Saint-Arnoult. Prieuré Saint Arnoul sur Touque
Le Président de l'Association Les Amis du Prieuré de Saint Arnoul sur Touque a autorisé notre Association a publié sur notre site une visite virtuelle de ce monument emblématique du Pays d'Auge. Nous le remercions chaleureusement.
l'entrée de la visite, c'est ici
Un peu d’histoire…
Classés Monuments Historiques en 1970, les bâtiments de l’ancienne église paroissiale et de la chapelle prieurale qui la jouxte, se dressent sur une forte pente, à flanc de coteau sur la rive gauche de la Touques, et sont dédiés à Saint-Arnoul (st. Arnoul d’Yvelines mort au milieu du VIe siècle). Ils sont en vis à vis de Touques et du château ducal de Bonneville sur Touques (lieu du serment d’Harold).
Aux pieds des édifices se trouve la « vieille Touques » qui était le cours naturel de la rivière la Touques, avant 1873.
L’ensemble est orienté Ouest-Est, et se compose à l’Est d’une chapelle sur crypte de plan rectangulaire, seul élément encore subsistant du prieuré fondé au XIe siècle à proximité de deux sources aux eaux curatives (piscine romane de Saint Arnoul et fontaine de Saint-Clair) vénérées de tous temps par de nombreux pèlerins. Dans le prolongement occidental de cette chapelle, bien conservée, s’élèvent les murs, à ciel ouvert, de l’église paroissiale. Un clocher de plan carré s’élève, hors d’œuvre, au Sud-Est de cette nef. L’entrée s’effectue au Sud dans les deux parties de l’édifice.
La chapelle du prieuré avait un titulaire et un temporel distincts de ceux de l’église qui lui est contiguë. L’édifice paroissial est antérieur au prieuré dont la fondation remonte au XIe siècle (1061) et c’est la première fondation Clunisienne établie en Normandie Le cartulaire du prieuré principal de Longpont (ordre de Saint Benoît et dépendant de Cluny) (près de Montlhéry et Etampes) atteste de la création et du rattachement du prieuré simple de Saint-Arnoult à Longpont, jusqu’au XVIIIe siècle. Les moines bénédictins clunisiens subsistèrent sur place jusqu’au XIIIe siècle.
Les parties les plus anciennes de l’église paroissiale remontent à minima au Xe siècle et sont donc bien antérieures à la fondation du prieuré. Les procès-verbaux des visites paroissiales consignent que l’église paroissiale était encore en bon état en 1763. Conséquence de la Révolution, la paroisse de Saint-Arnoult est supprimée et rattachée à Tourgéville (avec transfert d’une partie du mobilier et statuaire).
La ruine totale et la destruction furent évitées en 1842 par le colonel Langlois qui racheta le tout en s’engageant à l’entretenir. Le terrain restant bien communal. Cette transaction fut le fruit de la détermination sans faille, durant quarante ans, des premiers responsables de la commune de Saint-Arnoult, au sortir de la Révolution.
Un peu d’architecture…
Tous les ouvrages traitant de l’art roman en Normandie citent l’édifice de Saint-Arnoult, et particulièrement la chapelle prieurale. Déjà en 1867, Arcisse De CAUMONT consacre un « article » au Prieuré de Saint Arnoul sur Touque dans « Les statistiques monumentales du Calvados ».
Suite aux récentes (2010-2011) études archéologiques du bâti menées sur les ruines de l’église et la tour du clocher, on peut discerner cinq grandes phases (d’après Monsieur François DELAHAYE de l’INRAP):
1- La « première » église discernable via les élévations existantes est antérieure à 1061(de façon certaine) et probablement (à minima) Xe…
Nef plan rectangulaire avec des dimensions (longueur et largeur) identiques à celles du plan Roman ultérieur, le chœur carré sera un peu élargi en 1061; les hauteurs étaient inférieures à celles du plan Roman suivant (très discernable en suivant les enduits du pignon occidental, et sur la façade méridionale pratiquement à mi-élévation actuelle). Une porte (traces visibles) se trouvait sur la façade méridionale (à coté de celle qui subsiste)…
2- La tour du clocher, pour la première partie visible aujourd’hui (environ 2 à 3m d’élévation enterrée au XIXe), hors d’œuvre et dans un second temps, mais aussi antérieur à 1061 ; la seconde partie de cette tour viendrait après (XIIe, XIIIe) ; quant à la troisième qui nous est donnée à voir aujourd’hui, c’est le résultat d’un ajout (XVIIe mais probablement XVIIIe) avec des enduits gris comportant des résidus de forges…
Sur la façade orientale du clocher a été relevé, en partie supérieure du 1er étage, les « empreintes » d’une toiture d’un bâtiment adossé à cette tour et jouxtant la chapelle…
Serait-ce cette construction qui aurait été détruite par un incendie (XIIIe ?) dont on observe les stigmates sur la chapelle prieurale et le clocher et l’église ?
3- En 1061, édification de la chapelle prieurale sur sa crypte (en situation de rez-de-chaussée). A l’extérieur, au Nord et au Sud, parties non remaniées, les murs sont bâtis en opus spicatum, mode de construction fort répandu à la fin du XIe siècle, mais qu’on utilisa encore fréquemment au début du siècle suivant (employés comme « chaînage »).
La façade Nord a gardé ses deux contreforts très plats et deux petites baies plein cintre à arc monolithe, alors qu’au Sud on ne trouve plus aucune ouverture, si ce n’est celle qui est bouchée, et la porte percée à l’époque moderne, comme les trois ouvertures du mur de chevet. A l’intérieur, les deux murs latéraux sont ornés d’arcatures aveugles reposant sur des colonnettes à fûts lisses portant des chapiteaux à corbeilles tantôt nues, tantôt ornées de plis semblables à des godrons, d’entrelacs ou de volutes d’angles.
La charpente est estimée « primitive et du XIIIe pour une grande partie ».
La crypte, qui servit d’ossuaire (relèvement de l’ancien cimetière), porte une voûte en berceau très surbaissée sur des doubleaux plein cintre : c’est une disposition très rare en Normandie. En réalité, c’est une « église basse » qui possède deux ouvertures au chevet et une sur le coté Sud, malheureusement masquée par les remblais qui ont contribué à créer l’escalier d’accès à la chapelle au milieu du XIXe siècle.
Concomitamment, la « reprise » du chœur de l’église sur la façade septentrionale avec un léger élargissement (ce qui donne cette présentation homogène avec des murs parfaitement harpés), mais aussi un accroissement de la hauteur des murs gouttereaux, tels que nous les voyons aujourd’hui…
4- Au XIVe ou XVe, édification de la très élégante chapelle pentagonale gothique, très certainement à vocation funéraire (nécropole) sur la façade septentrionale…
5- Au XVe complément d’élargissement de la nef sur la façade septentrionale avec ce « déambulatoire » couvert en terrasse (pierres plates, remarquablement ouvragées, dont nous conservons des exemplaires) ; le mur Roman est ainsi remplacé par des colonnes et des arcades plein-cintres (cf. documents iconographiques du XIXe)… On distingue aujourd’hui ce qui était une porte ouvrante vers l’intérieur (seuil -40cm au-dessous du sol actuel) qui sans doute devait faciliter la « communication » église-presbytère (Prieuré)…
L’ouverture sur la façade occidentale est « moderne » (XVII-XVIIIe) avec mise en place d’un porche…
Les fenêtres des parties anciennes (1 au nord, 3 au sud et 1 à l’ouest) sont positionnées aux environs du XIIIe, sauf une fenêtre du chœur (coté septentrional) qui est 1061…
Le mur septentrional du chœur laisse apparaître une reprise au dessus des ouvertures qui peut-être consécutive à la mise en place de la chapelle latérale gothique…
Toutes les assises des différentes toitures, suivant les périodes, ont pu être relevées…
Nous sommes en présence d’un édifice religieux parmi les plus anciens, sinon le plus ancien, (analysés) du département, de part ses élévations antérieures à 1061…
Un cimetière entourait l’église jusqu’au début du XIXe…
Par ailleurs on peut estimer probable la présence d’une centaine de sépultures à l’intérieur de l’église…
Il est remarquable de noter que l’ensemble de ces édifices, l’église et son clocher avec la chapelle prieurale se donne à « lire » comme :
- une nef, l’église,
- et un chœur, la chapelle ;
n’avions-nous pas là le dessein des « fondateurs » du prieuré, par ailleurs « bénéficiaires » de l’église, en 1061, d’aboutir à une « grande chapelle prieurale » dans le cadre d’un développement communautaire clunisien ?
Bibliographie : le site internet des amis du prieuré
« Le prieuré de Saint Arnoul sur Touque » 1923 (Victor HUNGER)
De la Société des Antiquaires de Normandie (imprimerie C. PAILHE, PARIS)
François Delahaye est archéologue du bâti (INRAP et ARTeHIS)…
Master 1&2 de Mlle Amélie Prat (2009/2010/2011), sous la direction de Mme Véronique Gazeau, UFR d’Histoire, Université de CAEN Basse-Normandie
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- Dernière mise à jour : 25/03/2016